Projets de recherche

N'hésitez pas à me contacter si l'un ou l'autre de ces projets de recherche vous intéresse.

Les Psaumes manichéens dits de Thomas. Introduction, édition, traduction et commentaire

Dernière religion à visée universelle à avoir vu le jour avant l’islam, le manichéisme doit son origine au Mésopotamien Mani, né en 216 de notre ère et mort en 274/277. Mani donna d’emblée à son mouvement religieux une portée universelle et une dimension missionnaire. Du vivant même du fondateur, sa religion gagna l’Iran sassanide, parvint aux frontières de l’Inde et atteignit l’Occident. Comme l’atteste l’importance de la documentation découverte dans cette région, la mission manichéenne connut un succès notable en Égypte, où elle avait été lancée très tôt à l’initiative de Mani lui-même, et où elle se maintint au moins jusqu’au début du Ve s. Un important ensemble d’écrits manichéens coptes copiés dans la seconde moitié du IVe s. et retrouvés en 1929 témoigne de la vitalité du manichéisme dans la vallée du Nil. Cette découverte et d’autres qui se sont produites depuis le début du XXe s. ont permis de pallier en bonne partie la proscription et la destruction des écrits coptes, et de corriger l’image de la Religion de lumière que propagea la littérature polémique. Les «Psaumes (dits) de Thomas» font partie de ce lot de manuscrits coptes sur papyrus découverts en octobre 1929, près de Medinet Madi, dans le Fayoum, en Égypte, et édités en 1938. La présente proposition de recherche a comme objectif de produire la première traduction française intégrale de cette collection de ces hymnes manichéens. Il s’agira de la première traduction intégrale de ce groupe de textes à paraître depuis 1980. Les objectifs du projet sont les suivants : 1° traduction française intégrale des vingt Psaumes de Thomas, qui tiendra compte de la métrique et adoptera une disposition strophique; 2° introduction codicologique, linguistique, historique et littéraire aux Psaumes de Thomas; 3° commentaire philologique, historique et doctrinal des Psaumes de Thomas; 4° index copte et français du vocabulaire technique et des thèmes; 5° publication de l’ensemble. L’originalité du projet réside dans le fait qu’il offrira une première traduction française complète des Psaumes de Thomas, qui tiendra compte des progrès réalisés, depuis les années 1950, dans la publication des sources manichéennes en grec, copte, chinois et iranien, et des sources indirectes, ainsi que de l’apport massif de sources gnostiques coptes. Elle visera aussi à mettre en valeur l’originalité et la singularité des Psaumes de Thomas au sein du Psautier manichéen et de la littérature manichéenne en général. Plusieurs points devront faire l’objectif d’une réévaluation critique, dont celle de l’interprétation du titre de ces psaumes, de leur situation dans le panorama religieux du Proche-Orient tardoantique, de leur rapport aux écrits mandéens, ainsi que la question de leur datation et de la langue de composition. Cette première traduction française intégrale des Psaumes de Thomas comblera une lacune de la bibliographie manichéenne en procurant un accès renouvelé à une œuvre dont la plus récente traduction, allemande, remonte à plus de quarante ans. Elle prendra place à côté des publications qui ont été consacrées au Psautier manichéen depuis une vingtaine d’années. Celle que nous envisageons ne vise pas seulement le lectorat francophone mais l’ensemble des spécialistes du manichéisme dans la mesure où elle cherchera à proposer une nouvelle interprétation des Psaumes de Thomas. En dehors des études manichéennes proprement dites, cette publication enrichira le corpus de la littérature religieuse de l’Antiquité tardive. La parution de la traduction française dans une collection que se veut à la fois savante et accessible permettra la diffusion des Psaumes de Thomas auprès d’un large public, qui aura ainsi accès plus facile à un chef-d’œuvre de la littérature manichéenne et de l’hymnologie tardoantique.

Cochercheur avec Paul-Hubert Poirier.

Projet financé par le Conseil de recherche en sciences humaines du Canada - Savoir - 2022-2025.

Les Syllogismes d’Apelle, disciple de Marcion : réévaluation des sources, traduction française et commentaire des fragments

Loin de l’image d’unité qu’il cherche parfois à véhiculer, le christianisme fut marqué, dès ses débuts, par un riche foisonnement de doctrines et d’opinions sur Dieu, le Christ, et la place de l’être humain dans le cosmos. Le présent projet porte sur Apelle, une des figures importantes ayant participé à ces débats au deuxième siècle de notre ère. Apelle est principalement connu comme le plus célèbre des disciples de Marcion, lui-même un des théologiens les plus controversés des débuts du christianisme. Bien qu’on le présente comme un disciple de Marcion et un gnostique, Apelle aurait quitté son maître et l’entourage de celui-ci à un moment et dans des circonstances que nous ignorons. Apelle est présenté par ses adversaires comme indépendant d’esprit et de réflexion et, en cette qualité, Apelle a développé sur Dieu, le Christ et l’homme, des doctrines singulières, qui ne nous sont connus que partiellement et à travers le prisme de ses adversaires. Parmi les œuvres attribuées à Apelle figurent notamment un ouvrage contre l’Ancien Testament, sous le titre Syllogismes, dont des passages ont été cités, et préservés, par des auteurs anciens. Le système d’Apelle a attiré l’attention de ses contemporains et a suscité de vives critiques. Si Appelle est étroitement associé au marcionisme, on voit qu’il s’en distingua également assez rapidement, pour occuper une position singulière encore peu étudiée par la recherche, entre le marcionisme et le gnosticisme, auquel certains opposants le rattachent.

Les problèmes entourant la figure d’Apelle et son œuvre sont nombreux, mais le principal demeure l’absence d’une étude d’ensemble, qui tiendrait compte de toutes les sources sur Apelle, du moins celles qui sont pour le moment connues. Depuis les travaux pionniers d’A. von Harnack (1874 et 1890), presqu’aucune attention particulière ne fut accordée au personnage, malgré le renouveau des études sur le marcionisme et le gnosticisme des 70 dernières années. À ce jour, on connaît donc encore mal le personnage et son œuvre, sa relation à Marcion et au marcionisme, et particulièrement ses liens avec les mouvements et les doctrines « gnostiques ». En outre, presque rien portant spécifiquement sur Apelle n’a été produit en français. Notre projet de vise à faire connaître et à rendre plus accessibles la figure et la pensée d’Apelle, ainsi que les fragments de ses Syllogismes, en en produisant une traduction française qui réponde aux exigences scientifiques actuelles, notamment en ce qui concerne les études gnostiques. Le projet poursuit les objectifs spécifiques suivants : 1) réévaluation et nouvel inventaire des témoignages anciens sur la figure et la pensée d’Apelle et des citations grecques et latines des Syllogismes; 2) première traduction française de l’ensemble des témoignages sur Apelle et des fragments de son œuvre; rédaction d’une introduction et d’un commentaire historique et doctrinal des fragments de l’œuvre d’Apelle.

De manière générale, ce projet propose de revoir l’histoire du christianisme ancien en passant par l’étude d’une de ses formes primitives. Il vise ainsi à explorer et à comprendre la diversité qu’a connue la nouvelle religion chrétienne au cours de sa formation et de son développement. À cet égard, les expressions marginales du christianisme ou celles qui ont été rejetées au cours de l’histoire ne sont pas moins importantes que celles qui se sont imposées et ont survécu. L’étude de ces mouvements et de cette diversité est fondamentale, notamment parce qu’ils sont les reflets des tensions et des conflits qui ont marqué le développement du christianisme aux deuxième et troisième siècles de notre ère. Ces tensions et conflits ont joué entre les courants religieux jouent un rôle important dans la formation de leur identité respective.

Projet financé par le Conseil de recherche en sciences humaines du Canada - Développement savoir - 2021-2023.

Édition critique, traduction française et étude des Épîtres de Paul en copte fayoumique (Pierpont Morgan Library de New York, M.660)

Résumé

Ce projet a pour objet l’édition critique, la traduction française et l’étude des « Épîtres » de Paul préservées en copte fayoumique dans le manuscrit M 660 du Morgan Library and Museum de New York et des fragments Michigan Coptic Ms. 158-159, de la University of Michigan Library d’Ann Arbor. Langue de l’Égypte chrétienne ancienne, le copte se décline en plusieurs dialectes régionaux, dont les mieux représentés d’un point de vue textuel sont le bohaïrique (dialecte du Delta du Nil) et le sahidique (dialecte méridional devenu le dialecte littéraire par excellence). Parmi les dialectes dits « mineurs » figure le « fayoumique », variante non moins importante du copte tel qu’il s’est développé dans l’oasis du Fayoum. Le dialecte fayoumique est assez bien représenté quant aux textes préservés. Or, si les témoins sont relativement nombreux, la grande majorité de ceux-ci sont cependant fragmentaires. Un codex fait toutefois exception, à savoir le M 660, un des manuscrits copte les mieux préservés du Morgan Library and Museum de New York. Or, malgré l’importance de ce manuscrit pour notre connaissance du dialecte fayoumique, non seulement en raison de son état de conservation, mais aussi parce que les textes préservés dans le M 660 équivalent quantitativement, à eux seuls, à tout le reste de ce qui est conservé dans ce dialecte, le manuscrit n’a jamais été édité.

L’intérêt de ce projet est donc avant tout linguistique et textuel, pour le dialecte fayoumique lui-même et pour la langue copte en général. En effet, l’édition et l’étude de ce manuscrit ajouteront beaucoup à nos connaissances de la morphologie du dialecte fayoumique et du copte, que ce soit du point de vue de formes uniques non attestées dans les autres témoins ou de conjugaisons moins fréquemment rencontrées et encore mal comprises. L’édition des « Épîtres » de Paul fayoumiques du M 660 enrichira également les études comparatives entre les dialectes du copte. En dehors du bohaïrique et du sahidique, donc sur le plan des dialectes « mineurs », aucun autre témoin de la taille du M 660 n’est actuellement sans édition critique. Dans une moindre mesure, ce projet revêt également un intérêt pour la critique textuelle et notre connaissance des variantes des « Épîtres » de Paul, ainsi que pour les études qui portent sur la culture ancienne, l’oasis du Fayoum s’étant développé, par son isolement, de manière souvent unique et originale par rapport au reste de l’Égypte ancienne.

Projet financé par le Fonds de recherche du Québec-Société et culture - Soutien à la recherche pour la relève professorale - 2020-2023.

Édition critique, traduction française, introduction et concordance de l'"Anonyme de Bruce" (Bibliothèque bodléienne d'Oxford, MS Bruce 96)

Résumé

Ce projet porte sur l’Anonyme de Bruce, un traité chrétien du quatrième siècle de notre ère conservé en copte, la langue de l’Égypte chrétienne ancienne. Connu des chercheurs depuis la fin du dix-huitième siècle, ce texte est une des plus anciennes sources directes du gnosticisme, un courant de pensée philosophique et religieux pour lequel la connaissance par l’âme de son origine divine constitue la condition de son salut. Ce texte se démarque des autres traités du même type par l’intérêt de son auteur à allier les idées issues du christianisme, des courants gnostiques et de la philosophie néoplatonicienne. Le travail à accomplir pour le projet proposé découle du principal problème entourant l’étude de l’Anonyme de Bruce, à savoir le manque de fiabilité des éditions critiques, des traductions et des analyses auxquelles ont accès les chercheurs. La dernière édition critique du texte copte de l’Anonyme de Bruce remonte en effet à 1933 (Baynes 1933); sa première, et dernière, traduction française date de 1891 (Amélineau 1891); enfin, le traité n’a fait l’objet d’aucune étude globale depuis celle de Baynes, en 1933. Les objectifs de ce projet sont conséquemment multiples : nouvel établissement critique et concordance du texte copte, nouvelle traduction française et introduction approfondie au traité.

Cette recherche contribuera de manière importante à l’avancement des connaissances. De manière générale, le projet propose de revoir l’histoire du christianisme ancien en passant par l’étude d’une de ses formes primitives. Il vise ainsi à mieux comprendre la diversité qu’a connue la religion chrétienne au cours de sa formation. Trésors spirituels de l’humanité pour leur réflexion sur le divin et sur l’origine du mal, les textes gnostiques sont aussi un témoin important des tensions et des conflits qui ont marqué les débuts du christianisme. Les résultats attendus par la réalisation de ce projet sont doubles. Les premiers permettront de mieux comprendre l’Anonyme de Bruce lui-même, tandis que les seconds contribueront à éclairer davantage les interactions entre pensée chrétienne, pensée gnostique et philosophie néoplatonicienne. Les retombées de cette recherche seront nombreuses. Un traitement complet de l’Anonyme de Bruce apportera d’abord une pièce de plus au casse-tête du développement de la pensée chrétienne ancienne et des liens entre les différents courants philosophiques et religieux qui ont foisonné aux deuxième et troisième siècles de notre ère. De plus, la poursuite de travaux de haut calibre dans le champ des études gnostiques permettra au Canada de demeurer un leader mondialement reconnu dans le domaine et le chef de file dans la francophonie. Bien que s’adressant d’abord aux chercheurs qui œuvrent dans le domaine des origines chrétiennes, cette recherche, en raison de son caractère pluridisciplinaire (histoire, religion et philosophie), intéressera également les chercheurs issus d’autres disciplines et secteurs de recherche, notamment la philosophie et l’histoire de l’Antiquité. En dehors de la communauté universitaire, le projet intéressera le grand public en proposant une image nouvelle et nuancée du christianisme des premiers siècles, en tant que religion hétérogène où évoluaient, s’influençaient et se concurrençaient les idées et les groupes les plus divers.

Projet financé par le Conseil de recherche en sciences humaines du Canada - Développement savoir - 2016-2018.